6 février 2007

Carnet de bord, Deisheh, Hébron (fin)

Ce huit août est une journée haute en émotions de toutes parts. Nous avons débuté notre visite par le camp de réfugiés de Deisheh, situé à mi chemin entre Hébron et Bethlehem. Ce camp a été l'un des théâtres de nombreux et violents affrontements entre palestiniens et armée israélienne, notamment lors de la première Intifada. Les traces de ces violences subsistent de part l'entrée du camp, où chaque habitant devaient passer par un seul et unique tourniquet. C'était donc une prison à ciel ouvert ou s'entasse plusieurs milliers de réfugiés. Contrairement à ce que beaucoup pensent, les camps de réfugiés sont en durs, les maisons se sont construites notamment lorsque les palestiniens se sont rendus compte que leur situation de réfugiés allait perdurer de nombreuses années. Cependant, le statut de 'réfugié' est resté, donné par le petit centre des Nations Unis, qui fournit le stricte minimum vital aux habitants vivant dans une précarité immense. (voir photo) Nous avons tout d'abord visité le centre social du camp, dont les murs sont ornés de peintures représentant la situation et le sentiment des artistes, originaires du camp. (photo à gauche)

Notre jeune guide du jour, nous a baladé dans ce camp meurtri. Il nous a, de plus, présenté une famille palestinienne dont la fille de 14 ans, a été tuée d'une balle dans la tête, par derrière, à bout portant, par un soldat israélien, en 1994. Cette jeune fille, se rendait à un enterrement qui a mal tourné. Nous avons vue la vidéo de l'évènement. L'armée a encerclée la manifestation et tiré sur la foule. Cette famille nous a gentiment ouvert les portes de sa maison afin de nous expliquer l'histoire de leur fille. Ils nous ont montré les photos du cadavre de leur enfant (photo à droite). Certain d'entre nous ont été choqués par cette forme d'"impudeur". Leur rapport à la mort est en effet très différent du notre, en occident, surtout compte tenu de leur situation et du fait que la mort constitue un véritable élément de leur vie quotidienne. Nous avons finalement quitté le camps, émus.


Soirée mouvementée

A notre retour à Hébron, le soir, nous sommes retournés fumer notre chicha avec les palestiniens de la veille. Nous avons voulu retenter l'expérience fabuleuse du pick up, et trois d'entre nous sont partis vers minuit.
Nous avons parcouru 300 mètres, tourné à gauche et là... check point mobile. Une jeep blindée en travers de la route nous incite à nous arrêter. Les soldats braquent leur M16 sur nous, nous hurlant de descendre immédiatement du véhicule. "Passeports, Passeports !" crient ils. Nous obéissons sans broncher. Ils nous font attendre sur le bas côté. Ils parlent en hébreux avec l'un des chefs de la police palestinienne d'Hébron, qui conduisait le pick up. Ils se mettent à fouiller le véhicule de fond en comble. Là, ils trouvent dans la boite à gant, un chargeur de flingue, plein. La tension monte d'un cran. Sans rien comprendre à ce qu'ils disent, nous sentons que la présence de ce chargeur a grandement énervé le soldat, surtout qu'il ne trouve pas le flingue qui est supposé aller avec. Après un dernier check up de la voiture il nous ordonne de remonter pour attendre la vérification de nos identités. A ce moment se pointe une équipe de télévision. Ils se mettent à filmer la scène et puis voyant que rien de croustillant ne se passe, ils finissent par partir.

Lorsque nous étions tous dans la voiture, nous avons remarqué que l'un des soldats qui nous avait braqué, jouait avec la lampe accrochée à son M16. Il courrait après son collègue et tentait de lui mettre la lumière dans les yeux. J'étais effarée ! C'est à ce moment que je me suis rendue compte que la plupart de ces soldats sont de très jeunes hommes, à peine sortis de l'école. Nous avons attendu une bonne heure, pendant laquelle d'autres voitures ont été contrôlées (voir photo). Une autre jeep blindée est venue s'arrêter juste à côté de nous. Les militaires ont braqué la lampe aveuglante de leur jeep sur nous et ont joué du gyrophare plusieurs fois. Je ne sais pas trop où était l'intérêt, mais ça ne nous a pas perturbé.

Nous avons finalement récupéré nos passeports et sommes repartis, blasés. Avant de nous raccompagner à notre lieu de couche, le policier s'est arrêté au coin d'une autre rue et s'est mis à prier. Étonnés, nous lui avons demandé pourquoi il faisait ça. C'est alors qu'il a sorti de la droite du siège conducteur un énorme flingue en disant : "heureusement qu'ils n'ont pas trouvé ça !" Nous étions subjugués. Comment ont ils pu passer à coté de ça ? Mais bon, nous étions heureux que les soldats n'aient rien trouvé. Le conducteur nous explique que même en tant que chef de la police palestinienne, il n'a pas le droit d'avoir d'armes sur lui et que si les soldats l'avaient trouvé, nous aurions certainement été expulsés du territoire après interrogatoire, et lui, aurait terminé sa course dans une geôle israélienne, doublée d'une amende de plusieurs milliers de dollars... En rigolant, il nous assure que dans quelques semaines, lorsqu'il recroisera le soldat avec qui il a négocié, il lui dira ce qu'il a manqué !

C'est ainsi que nous avons vécu une infime part de leur vie quotidienne, tout en sachant que ce n'était qu'une seule soirée et que pour eux, c'est toute une vie.

Nadia S.

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